Une rue portera bientôt son nom à Dijon : portrait de la résistante Blanche Grenier-Godard

Blanche Grenier-Godard sera bientôt le nom d’une rue à Dijon, en Côte. La résistante, méconnue, était pourtant à la tête d’un réseau d’environ 400 personnes au début de la Seconde Guerre mondiale. Grâce à son caractère et ses actions, 8.000 prisonniers et Juifs ont pu atteindre la zone libre.

Portrait de Blanche Grenier Godard au début des années 1930
Portrait de Blanche Grenier Godard au début des années 1930 – Dimitri Vouzelle

À Dijon, dans le quartier Valmy, vous marcherez bientôt dans la rue Blanche Grenier-Godard. Un nom peu connu, pourtant cette résistante a réalisé des prouesses au début de la Seconde Guerre mondiale. Dans les années 1930, Blanche Grenier-Godard est infirmière à domicile, à Dijon. Née en 1900 dans le Jura, elle est arrivée à vingt ans dans la Citée des Ducs. Dans son quartier Saint-Michel, elle mène une vie correcte avec son mari, Alphonse et ses deux garçons René et Jean.

Résistance immédiate

Les nazis occupent Dijon dès le mois de juin 1940. Dans le même temps, Blanche Grenier-Godard décide de résister à sa manière. Dans son sillage, sa famille aussi. Régulièrement, les Grenier-Godard apportent des ravitaillements aux prisonniers du camp de Longvic. Très vite, la famille, accompagnée des commerçants du quartier, se spécialise dans l’évasion des prisonniers.

Blanche Grenier-Godard (au centre) lors de la remise intime du drapeau du réseau du 43 rue Saumaise à Dijon en mai 1949 - Dimitri Vouzelle
Blanche Grenier-Godard (au centre) lors de la remise intime du drapeau du réseau du 43 rue Saumaise à Dijon en mai 1949 – Dimitri Vouzelle – Dimitri Vouzelle

Certains fournissent du pain, des légumes, d’autres du vin et des habits, sans oublier un toit pour se cacher ainsi que de nouveaux vêtements et des faux papiers. Pour les faire passer en zone libre, plusieurs moyens s’offrent à ce réseau de résistants. René et Jean, 15 et 11 ans à l’époque, accompagnent des groupes de prisonniers au dépôt SNCF de Périgny. Les cheminots cachent ensuite les prisonniers dans les wagons. Certains prennent aussi le bus pour atteindre la ligne de démarcation à Seurre ou Montceau-les-Mines. Les passeurs du réseau de Blanche Grenier-Godard s’occupent du reste.

À partir de 1941, le réseau de l’ex-infirmière à domicile passe des familles juives en zone libre. En parallèle de ces passes, le réseau se spécialise aussi dans le renseignement militaire avec les bureaux de résistants de Lyon et Londres.

Alphonse Grenier-Godard  au début des années 1910
Alphonse Grenier-Godard au début des années 1910 – Dimitri Vouzelle

“Une femme sans concession”

Qu’est-ce qui a poussé Blanche Grenier-Godard à créer son propre réseau de résistance ? “Au départ, c’est l’humanité” répond le professeur d’histoire, Dimitri Vouzelle qui a écrit un livre sur le réseau Grenier-Godard (Pionnier de la Résistance : Le réseau Grenier-Godard (1940-1942)). Dimitri Vouzelle poursuit : “Les Dijonnais voyaient les prisonniers. Ils faisaient pitié. Beaucoup de Dijonnais ont voulu les aider.

Mais Blanche Grenier-Godard a quelque chose en plus. “C’est une femme sans concession et énergique, décrit Dimitri Vouzelle. Physiquement, elle est toute petite. Son entourage la surnomme Edith Piaf !” Au moment de son emprisonnement, elle est à la tête d’un réseau d’environ 400 personnes. En deux ans, de 1940 à 1942, le réseau Grenier-Godard a réussi à faire passer en zone libre 8.000 prisonniers et Juifs. Ces prouesses lui vaudront même des critiques. Dimitri Vouzelle explique : “D’autres résistants dijonnais la traitaient de menteuse. Les archives montrent l’inverse.

Blanche Grenier-Godard faisant les attestations pour son réseau  à la fin des années 1940
Blanche Grenier-Godard faisant les attestations pour son réseau à la fin des années 1940 – Dimitri Vouzelle

Engagement politique après la guerre

Blanche et son fils René sont déportés en 1942. Elle, dans la prison de Jauer en Silésie (Pologne actuelle), puis elle est transférée dans une autre prison, en Bavière (Allemagne). René décède dans le camp de concentration de Dora (Allemagne) entre la fin mars et début avril 1945. Blanche aura plus de chance. Elle est libérée le 26 avril 1945 par les Américains. Elle passe un an de convalescence en Suisse. À son retour à Dijon, elle s’engage dans le mouvement gaulliste du RPF et siège même au Conseil municipal de Dijon.

Une rue au nom de Blanche Grenier-Godard

Le Conseil municipal de Dijon a décidé, le 20 mars 2023, de renommer cinq rues aux noms de femmes importantes : Suzanne Valadon, artiste-peintre (1865-1938), Gisèle Halimi, avocate et femme politique (1927-2020), Madeleine Tournamille, adjointe au Maire de Dijon (1901-1990) et Blanche Grenier-Godard, résistante (1900-1974). Ces 4 noms seront affichés lors de la fin des travaux dans le quartier Valmy.

Les femmes dans la résistance était un véritable angle-mort de l’histoire. Cette rue Blanche Grenier-Godard est une très bonne chose” se réjouit Dimitri Vouzelle. Son fils cadet, Jean, 94 ans cette année, sera présent au moment de l’inauguration.

René et Jean Grenier-Godard  au début des années 1930
René et Jean Grenier-Godard au début des années 1930 – Dimitri Vouzelle

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